La Roseraie de Rosheim

La Roseraie de Rosheim

dimanche 23 septembre 2012

Oubliez le monde l'espace d'un instant

Comme vous, nous aimons la nature, les grands espaces, l'air sans cesse renouvelé des montagnes. Comme vous, nous aspirons au calme loin de la Cité, loin de l'agitation frénétique, à l'abri du quotidien. Oh, comme vous nous prenons notre part d'action, nous courons aussi à gauche et à droite, mais nous voulons faire une pause.

Cette pose-là, nous l'avons faite dans le Parco Nazionale del Monte Gennargentu, au sud de Nuoro, dans cette région montagneuse de Sardaigne dans laquelle se réfugiaient les populations autochtones lors des nombreuses invasions qui ont jalonné leur histoire. L'endroit est aussi connu pour avoir l'une des densités de population les plus faibles d'Europe. Nous n'avons pas parcouru les routes à rechercher les espaces les plus pittoresques, les paysages les plus mystérieux, et pourquoi pas les tables les plus fines. Humer, sentir, vivre enfin cette terre accueillante, cette tranche de nature, était notre seul but.

La présence de lichen, ce phénomène issu de la cohabitation d'une algue et
d'un champignon, est une indication de la qualité de l'air




Le drapeau sarde, proche de celui de la Corse, montre non pas une mais quatre têtes de Maures aux yeux bandés. Il s'agit probablement de l'évocation de la victoire de Pierre 1er d'Aragon lors de la bataille d'Alcoraz en 1096. Pour des raisons diplomatiques, le bandeau fut relevé au-dessus des yeux par une loi du 15 avril 1999. Assurément, tous les Sardes n'ont pas encore respecté cette loi.

Les premiers âges de la pierre ont laissé de nombreux témoignages de l'occupation de l'île par les prédécesseurs de l'homo sapiens il y a plus de 250 000 ans. Les temps pré-historiques ont vu naître différentes cultures dont la plus significative a été appelée culture nuragique à partir du 15ème siècle av. J.-C., du nom des nuraghe, grandes constructions coniques abritant différentes chambres mortuaires surmontées vraisemblablement d'une coupole probablement végétale. On en compte plus de 7000 pour toute la Sardaigne.



Un dolmen comme de si nombreux autres dolmens dans le monde,
et dont on  ne connaît toujours pas la signification exacte

Ces roches contiennent des dizaines de loges ou "domus", 
tombes creusées dans leurs flans entre les IV et III millénaires
avant notre ère

Dont voici un exemple, où l'encadrement taillé devait
abriter une porte en pierre

A partir du 9ème siècle av. J.-C. commence une succession d'invasions plus ou moins durables, d'abord de Phéniciens qui créèrent de nombreux ports dont Karali devenu Cagliari. Puis les Carthaginois s'emparent de l'île jusqu'à sa cession à l'empire romain en 238 av. J.-C. Mais les Vandales, après l'invasion de la Péninsule Ibérique, déferlent sur l'Afrique du Nord et envahissent la Sardaigne par le sud vers 460 de notre ère. C'est en 534 que l'Empereur Justinien reprend l'île aux Vandales, y introduisant le christianisme. On assiste alors à une christianisation souvent édulcorée de coutumes locales (disons païennes) qui sont encore perceptibles de nos jours.

Le Pape Boniface VIII donne en 1297 les îles de Sardaigne et de Corse à la couronne d'Espagne, geste concrétisé par l'arrivée d'Alfonse d'Aragon en 1323 sur l'île qui en adopte largement la culture. Puis l'île connaîtra une période de domination des Habsbourg et sera enfin cédée aux ducs de Savoie jusqu'en 1861 où le roi Vittorio Emanuele II de Savoie, roi de Sardaigne, proclame la création du Royaume d'Italie.

Je n'ai pas voulu donner ici une leçon d'histoire dont je serais bien incapable (comme vous, je puise mes renseignements sur internet avec les risques d'inexactitude que cela comporte), car de nombreuses publications et des sites directement accessibles vous en apprendront tellement mieux que je ne saurais le faire. Que les radicaux de l'Histoire veulent bien me pardonner ces raccourcis.
Ici, la nature se raconte sans fards
Il est intéressant de noter qu'une grande partie de la côte orientale revendique encore aujourd'hui le nom de Barbagia, ou parfois Barbaricino, anciennement Barbarie du nom donné par les Romains à cette région qui ne s'est (presque) jamais fait envahir (pour les romains, tous les "non-romains" étaient des barbares sans connotation péjorative). Aujourd'hui, les côtes sont allègrement laissées aux touristes qui se retrouvent dans un environnement strictement identique aux milliers de plages méditerranéennes, où les vrais sardes n'ont jamais mis le pied. Du reste, même les routes que nous avons empruntées se trouvent systématiquement sur le versant côté centre de l'île, et l'on y voit que rarement la mer. Nous avons quand même voulu nous assurer que la Sardaigne était bien une île entourée de mer, ce qui fut fait en quelques minutes seulement.

L'influence des différentes occupations au cours de l'histoire a une conséquence amusante: sur cette île on ne parle pas moins de 7 dialectes fort différents, dont l'un d'inspiration catalane et deux autres d'inspiration génoise ! Il faut dire tout de suite que certains dialectes sont totalement inintelligibles pour un italianisant, mais la courtoisie extrême des habitants fait que si l'on s'adresse à eux en italien, ils répondent également en italien. Car oui, les sardes sont d'une extrême gentillesse et les commerçants s'efforcent de nous parler en français. 




Si la densité de la population est très faible, celle des troupeaux en revanche, souvent livrés à eux-mêmes, est particulièrement élevée. Merveilleux petits cochons sauvages, moutons, chèvres, chevaux, vaches et taurillons se rencontrent partout, sur les hauts plateaux souvent très secs, ou sur les routes provinciales, paisiblement couchés sur le bitume. Notre rencontre avec quatre mouflons fut un moment de ravissement, hélas trop furtif et inattendu pour être photographié.



Un autre troupeau moins rigolo. Fuyons...
La petite bourgade d'Oliena non loin de laquelle nous logions ne brille guère par son faste et ses lumières. La population de ces régions est fière mais réservée. Il nous paraît évident que le minimum vital n'est pas toujours assuré, comme en témoignent de nombreux chantiers abandonnés ou les cours jonchées de vieilleries accumulées. Mais ne sommes-nous pas sous le soleil ? Demain il fera jour.






Moyen de transport privilégié


On refait le monde...

Les coutumes catholiques certes, mais avec un petit plus !
Le village d'Orgosolo marque sa différence par ses fresques par lesquelles s'expriment les habitants pour s'insurger contre les inégalités de toutes sortes. Vers le milieu du 20 ème siècle, des artistes locaux manifestent leurs sentiments contradictoires sur leurs murs, jusqu'à ce que le peintre Francesco del Casino, d'origine siennoise venu à Orgosolo en 1975, pérennise ces fresques parfois s'inspirant des oeuvres de Picasso. 

"Plantons une fleur pour les enfants du monde, victimes innocentes de la haine, du mal, des guerres, des adultes. Espérons et rêvons d'un monde apprivoisé de bonheur et de paix"

Ceci, l'UNICEF aurait pu l'exprimer sans peine, et en plus la couleur correspond au cyan de notre charte graphique !

Il rêve de la paix c'est sûr

                          




La commune est également connue pour son passé quelque peu chahuté par une tradition de bandits sardes qui ont donné lieu au tournage d'un film dont les principaux acteurs furent les bergers du pays. Nous avons eu l'occasion d'approcher les frères jumeaux Luigi et Pedro Confetti; si Luigi a adopté un statut de paisible commerçant revêtu de sa traditionnelle coiffe sarde, Pedro, ayant rejoint le maquis suite à d'innombrables altercations avec les autorités, ne nous a guère manifesté son enthousiasme;


Luigi Confetti, ancien berger sarde converti en
 paisible commerçant
Pedro Confetti vit depuis bientôt
dix ans dans le maquis
heureusement, l'objectif d'un paparazzi local nous en a fourni le portrait se cachant sous la visière de sa casquette de bandito sardo.
Çà, c'était juste pour ajouter un peu 
de piquant au blog...
Notre hôtel s'est caché dans cette nature que nous appelions de nos voeux. Non loin de là se trouve la résurgence de Su Gologone, une rivière qui, après avoir vraisemblablement parcouru quelque 65 km sous terre, surgit au fond d'un puits dont la profondeur explorée dépasse les 135 mètres. La transparence de l'eau et les couleurs qui s'en dégagent sont un hymne à la nature.
L'hôtel Su Gologone proche d'Oliena

Su Gologone revient de loin

Vue sereine
Une autre sérénité
Un gouffre d'une profondeur supérieure à 135 mètres




La Sardaigne est riche en spécialités culinaires relativement robustes, mais l'une de ses grandes spécialités est l'abondance de pains. Sans doute le plus ancien d'entre eux, dont l'origine remonte à la nuit des temps, est le pain carasau, ou pain toasté, préparé avec de la farine de blé dur, de la levure et de l'eau, traditionnellement par les femmes du village. Il est cuit à très haute température (minimum 250°C), gonfle comme une baudruche, puis est séparé en deux disques par une autre femme qui enlève la farine résiduelle. On peut le manger en l'état, ou alors le recuire aspergé d'un peu d'huile d'olive et de sel, et il devient croustillant à en faire briller les yeux de bonheur. Un tel pain sec était emporté par les bergers et se conservait de nombreux mois sans peine.

Le passé géologique de la Sardaigne fait apparaître de nombreuses formations rocheuses dont les fameuses roches de porphyre d'Arbatax.

  


Inclusions de roches volcaniques



Enfin, laissons encore glisser nos yeux sur ces paysages d'une douceur incomparable,




Le liège. L'écorce du chêne liège.


Les jeunes oliviers, à l'infini...
C'est vrai, la nature est sauvage. La vraie nature, en tous cas.

Arrivederci !
Et vous aurez compris que nous avons été conquis par ce monde à cheval entre une tradition jamais trahie, un attachement indéfectible à une nature parfaitement préservée et une ouverture sur le monde, prudente et sélective. Le tourisme est concentré autour du littoral mais les vraies richesses du pays en sont réservées à ceux qui savent ouvrir leur coeur à l'identité de cette île si riche en histoire, si riche en paysages indescriptibles de beauté. Comme toujours lorsque nous quittons de telles régions, nous n'avons que l'envie d'y retourner un jour. Un jour... après avoir abordé d'autre rivages...


La Sardaigne est une région d'Europe qui ne profite pas d'une richesse exceptionnelle. Nous y avons toutefois vu des enfants heureux, bien suivis par leurs parents attentifs, et la joie de vivre était bien visible sur leurs visages. L'UNICEF agit là où les enfants meurent par manque d'eau potable, de nourriture insuffisante et pauvre en protéines, par insuffisance de protection contre les maladies infectieuses.  l'UNICEF a besoin de l'aide de chacun, aidez l'UNICEF, selon vos moyens.


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